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Gaspé met un frein aux locations de courte durée. Un bon premier pas, mais allons plus loin.

Le 18 avril dernier, la Ville de Gaspé annonçait mettre un frein aux locations de courte durée. Notamment, la ville prévoit que les nouvelles règles « limiteront les usages permis, ainsi que les types de conversions possibles ». Bien que nous saluons cette nouvelle réglementation, nous demandons que la Ville prenne des engagements encore plus concrets pour contrer la prolifération des locations de courte durée. Outre la mesure visant à acquérir un certificat d’autorisation de la Ville de Gaspé, le communiqué reste avare sur les détails entourant les mesures précises de cette nouvelle réglementation.


Plusieurs questions demeurent :

  • Comment ce règlement sera-t-il appliqué?

  • Est-ce que la ville prévoit mettre en place un système de surveillance des annonces de courte durée?

  • Est-ce que la ville prévoit donner des contraventions réellement dissuasives?

  • Est-ce que le revenu de ces contraventions sera investi dans des projets de logements durables et abordables?


La réglementation proposée est nécessaire, mais insuffisante. Comme en témoigne un récent rapport du RCLALQ, la location de courte durée sur la plateforme Airbnb a une emprise importante et profondément nuisible sur le parc locatif, qui aggrave considérablement la crise du logement au Québec. Publié en mars 2023, ce rapport dépeint une situation alarmante, qui affecte directement les conditions de vie des populations, particulièrement pour les régions éloignées des grands centres comme la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine.


En février 2023, on comptait 848 annonces uniquement sur la plateforme AirBnb pour la région de Gaspésie-Îles de la Madeleine. En Gaspésie, sept hôtes (1.37%) possèdent à eux ou elles seules 10% des logements en location. Aussi, dans la MRC Côte-de-Gaspé, c’est 77.57% des annonces qui sont illégales. Le rapport nous apprend également que des 848 annonces en Gaspésie et aux Îles, 648 sont illégales (76.42%). Un véritable commerce qui précarise et appauvrit les locataires, aggravant ainsi une crise sociale et humaine.


Ainsi, quels mécanismes la ville prévoit-elle pour pouvoir réintroduire ces hébergements illégaux dans le marché locatif long terme?


Et pourquoi ne pas revoir les autorisations déjà émises?


Dans son règlement, la Ville de Gaspé permet d’ailleurs la location à courte durée dans les zones qui ne « possèdent pas de routes municipalisées et qui ne sont pas localisées à l’intérieur des périmètres urbains », fragilisant ainsi des personnes qui pourraient louer à l’année ce type d’hébergement. Comme mentionné dans le rapport du RCLALQ :


Les municipalités ont le pouvoir de réglementer les usages touristiques sur leur territoire pour ces catégories, en particulier les chalets ou les logements locatifs. Toutefois, une règle d’or générale est que « Réglementer n’est pas prohiber ». Les locataires sont très vulnérables dans ces situations, puisque les propriétaires qui détiennent une certification ont le droit d’évincer les locataires à la fin de leur bail pour changer l’affectation des logements en hébergement touristique.

Loin de sécuriser le droit au logement, cet amendement risque de fragiliser la situation de certaines personnes.


Favoriser le droit au logement avant le droit au gain financier

La location de courte durée amène des profits beaucoup plus élevés que la location de longue durée. L’appât du gain est réel et les mécanismes de location de courte durée rendent la dénonciation difficile, de même que l’application de toute réglementation. Par exemple, sur Airbnb, les adresses exactes ne sont pas publiques, permettant ainsi la location de courte durée à l’abri des regards.

Mentionnons aussi le faible nombre d’inspections faites sur le terrain (autour de 10% du nombre de logements). D’ailleurs, les inspections reposent sur un processus de dénonciation, processus qui est inefficace. Le rapport du RCLALQ explique :


Certaines personnes refusent de dénoncer quiconque, pour quelque raison que ce soit; d’autres seulement pour des cas graves; pour la plupart, dénoncer son voisin n’est jamais porteur d’une bonne entente de voisinage. De plus, les régions éloignées des grands centres sont souvent tissées serrées, et les personnes habitant ces régions ne voudront pas porter le stigmate de la dénonciation, en particulier les personnes à faible revenu. En faisant porter sur les individus le point de départ du travail d’inspection de l’État, le tissu social est fragilisé plutôt que protégé.

Au regard de l’étude d’envergure réalisée par le RCLALQ, l’annonce d’une nouvelle réglementation par la Ville de Gaspé est un outil de plus à sa disposition, mais seule, cette mesure est insuffisante.



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